mercredi 22 juillet 2015

Anatomie, pathologie et écorchés. Bienvenue au Musée Fragonard








Comme vous avez pu le constater dans de précédents articles sur ce blog, je suis fasciné par les musées scientifiques dont l’ambiance semble surgir d’une autre époque. C’est dans cette démarche que je me suis rendu au musée Fragonard.









 



Cet endroit  est constitué des collections de l’école nationale vétérinaire de Maison Alfort. C’est l'un des musées les plus anciens de France, héritier du cabinet de curiosité du roi que Claude Bourgelat, fondateur des deux premières écoles vétérinaires au monde, constitua à l'école d'Alfort en 1766.
Le but de la création de cet endroit était autant d’instruire les étudiants de l’école que d’impressionner le public avec des pièces spectaculaires.
L’organisation des collections actuelle date de 1902, après plusieurs modifications. Elle  visait la pédagogique, mais dès les années 1920, les étudiants se firent de plus en plus rares et son ouverture fut réservée aux visiteurs de marque. Cet aspect unique a été volontairement conservé, comme le témoignage unique de temps révolus. On représente un peu ainsi un musée de musée.

Fœtus humain






Ouvert au public depuis 1991, le musée Fragonard rassemble plus de 4 200 pièces présentées dans un cadre muséographique restauré. Une recente restauration a eu lieu en 2007 et 2008 et visait à redonner au musée son lustre d’antan. L’ensemble constitue un formidable témoignage de ce qu’était le musée d’un établissement prestigieux au début du XXe siècle.









 





Le bâtiment est découpé en quatre salles :
La première salle est consacrée à l’anatomie comparée. Les vitrines sont assez bien ordonnées par thématique ou appareil anatomique. On trouve également dans cette salle une importante collection de monstres animaux. Le but original n’était pas de présenter une galerie des horreurs, mais de permettre aux vétérinaires d’être capable de reconnaître des pathologies fœtales et de s’adapter aux difficultés en matière d’obstétrique.








 







Dans la seconde salle, on observe une belle collection de squelettes dont les modèles anatomiques de Louis Auzoux. Des mâchoires remplissent les vitrines de cette salle afin d’apprendre à déterminer l’âge des animaux par l’usure dentaire et à identifier les lésions dentaires.










 






La troisième salle a pour spécialité la pathologie. Par contre, la pathologie ancienne, typique du début du XXè siècle, comme des déformations osseuses liées au travail du bétail qui était fondamentalement différent, mais aussi aux maladies parasitaires et aux maladies infectieuses transmissible à l’homme comme la tuberculose.










Le cavalier de l'Apocalypse





La dernière salle, sous température contrôlée, contient quelques animaux naturalisés, une grande collection de parasites, mais surtout les fameux Écorchés d’Honoré Fragonard qu’il commença à préparer en 1766. Afin de préparer ses pièces d’études, Fragonard, en plus de disséquer minutieusement ses sujets, maîtrise une technique de conservation qui reste encore en partie un mystère de nos jours et a permis à ses réalisations de parvenir jusqu'à nous en résistant aux dommages du temps. De plus, il donne une touche dramatique à travers des mises en scènes théâtrales et en fait des œuvres d’art qui lui permettent  de s’assurer de larges revenus en les vendant à l’aristocratie.





L'Homme à la mandibule



On a découvert les principales particularités de la préparation des écorchés suite à l'épisode de canicule de 2003 qui a entraîné des fontes des injections vasculaires. Selon Christophe Degueurce, professeur d'anatomie à l'École nationale vétérinaire d'Alfort et conservateur du musée, les principales particularités tenaient à la nature de l'injection vasculaire : Fragonard ne recourait pas à la cire pour son mélange mais utilisait du suif de mouton. Cette graisse fondait à une température au-dessus de 20 °C, ce qui permettait de faire des injections dans les vaisseaux sans que le corps fût chauffé trop longtemps, voire sur des cadavres froids. Par ailleurs, Fragonard vernissait sa préparation avec de la résine de mélèze, la térébenthine de Venise, probablement à l'origine de l'absence d'attaque par les insectes destructeurs des pièces anatomiques sèches.




fœtus humains dansant la gigue




Sa collection était l'une des plus riches de France, sinon du monde, jusqu'à ce qu'elle soit dispersée sous la Révolution. Seuls 21 écorchés restés sur place à Alfort sont parvenus jusqu'à nous.
Ses pièces les plus célèbres sont « L'Homme à la mandibule », le « Groupe de fœtus humains dansant la gigue » et surtout « Le cavalier de l'Apocalypse » qui tenait autrefois dans sa main gauche des rênes de velours bleu qui passaient entre les mâchoires du cheval, et un fouet dans sa main droite. Une légende colportée par le naturaliste suédois Karl Asmund Rudolphi veut que ce cavalier soit en fait une cavalière, la « fiancée de Fragonard », légende reprise dans la littérature (il s’agit en réalité d’un adolescent d’une douzaine d’années).








Personnellement, je me suis demandé quelle a été la limite dans la démarche créatrice de Fragonard entre la recherche scientifique, l’amour de l’art, la demande de l’aristocratie qui achetait ses pièces et une éventuelle folie morbide.  Toujours est-il que ce travail  est encore présent presque 250 ans après sa création et qu’il est connu à travers le monde.


Voici ce que j'ai réussi à en photographier dans ce musée : 








Fœtus humain
Fœtus humain
























Fœtus humain















































































Le cavalier de l'Apocalypse
fœtus humains dansant la gigue
fœtus humains dansant la gigue
fœtus humains dansant la gigue



















































Le cavalier de l'Apocalypse